jeudi 5 janvier 2017

Problème anglophone : Paul Biya met fin au débat


Bien qu’il soit traditionnel, le discours de fin d’année du chef de l’État camerounais, Paul Biya, à ses compatriotes, est toujours très attendu. C’est un moment fort de communication politique d’autant que le chef de l’Exécutif camerounais n’est pas un homme particulièrement disert.

Mais son adresse à la nation le 31 décembre dernier était, tous les observateurs de la scène politique camerounaise en conviennent, encore plus attendue. Ceci pour deux raisons : la première, depuis les mouvements de grève lancés par les avocats et les enseignants de la partie anglophone du Cameroun il y a quelques semaines, l’on attendait que le président de la République parle. On peut penser qu’il a, entre temps, inspiré, orienté et instruit les actions du gouvernement et de son chef, le premier ministre Philemon Yang, mais l’on voulait l’entendre lui-même, pour que toutes les parties prenantes sachent à quoi s’en tenir.

La deuxième raison a trait à la situation économique. On se souvient que le chef de l’État camerounais a, en décembre 2016, réuni ses pairs de la sous-région Afrique centrale, en présence du Directeur général du FMI, Christine Lagarde, et du ministre français de l’Économie et des finances, Michel Sapin.

Sur l’un comme sur l’autre point, le président Paul Biya n’est pas passé par quatre chemins pour faire connaître sa position. D’abord en ce qui concerne les mouvements de grève observés dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ce que d’aucuns ont appelé « le problème anglophone », il a réaffirmé avec force le caractère indivisible du Cameroun.

On se souvient que lors de ces mouvements de contestation, certains manifestants ont cassé et brûlé des édifices et d’autres biens publics et privés, et profané des symboles de la nation. Il faut convenir avec Paul Biya que cela est inadmissible dans un pays où on n’a pas besoin d’aller dans le maquis pour exprimer ses opinions. Certains autres, à travers des messages diffusés sur les réseaux sociaux, ont fait dans la surenchère, et sont allés jusqu’à remettre en cause la forme de l’Etat, en réclamant le retour au fédéralisme. D’autres encore ont prôné la sécession…

Comme garant de la Constitution, de l’unité et de l’intégrité territoriale, Paul Biya ne pouvait bien sûr tolérer rien de tout cela. Ce qui ne veut pas dire qu’il soit sourd aux complaintes de ses concitoyens. À preuve, il a instruit la tenue de négociations entre le gouvernement, d’une part, et les grévistes, d’autre part. Négociations qui, dans le cas des revendications des avocats, ont déjà abouti à des propositions qui n’attendent plus que d’être validées par le gouvernement.

Mieux encore, Paul Biya annonce la création d’une structure chargée de veiller au bon fonctionnement du pluralisme culturel du Cameroun et, en particulier, du caractère bilingue du Cameroun. À présent, chacun sait à quoi s’en tenir.

S’agissant de l’économie, on peut considérer que bien que la situation soit, d’une manière générale difficile, Paul Biya a, pour sa part, voulu rassurer ses compatriotes. On sait que du fait de la chute drastique des cours des matières premières et, en particulier, du pétrole, les États de la sous-région Afrique centrale connaissent de grosses difficultés économiques. Le Cameroun n’est pas totalement épargné, bien que son économie fasse montre de plus de résilience. Dans un tel contexte, tout en envisageant des mesures correctives pour redresser l’économie, on peut comprendre que, en homme politique avisé à l’écoute de son peuple, Paul Biya exclut le retour à l’austérité, socle des politiques d’ajustement prônées par les bailleurs de fonds multilatéraux. On s’attend ainsi à ce que Yaoundé négocie avec les bailleurs de fonds en tenant compte des desiderata de ses populations, en toute souveraineté.

Moane Ehindi

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