L’actualité ces derniers
jours au Cameroun est dominée par les appels lancés par des élites politiques,
les militants de son parti, le RDPC, et diverses franges de la société
camerounaise, en direction du président Paul Biya et lui demandant de se
présenter à la prochaine élection présidentielle. Les médias s’en font chaque
jour largement l’écho.
Tout est parti de manière on
va dire anodine d’un appel lancé depuis le sud par quelques responsables
politiques ; depuis lors, les réunions se succèdent, les appels se
multiplient, les uns aussi insistants que les autres, qui demandent au président
Paul Biya, deux ans avant la fin de son mandat, d’être candidat à la prochaine
élection présidentielle : les sénateurs du Centre, les élites du Grand Nord,
les militants et les élites de la Lékié, les militants RDPC du Littoral, les
populations, les élites et les militants RDPC de l’Est, etc. Il faut d’ailleurs s’attendre à ce que dans les
prochains jours, le phénomène aille en s’amplifiant. Les observateurs n’hésitent
pas à prévoir une déferlante.
Qu’est-ce qui peut bien
pousser les partisans du président Paul Biya à demander que leur champion
brigue un autre mandat à la tête de l’État, alors même que son bail court
jusqu’en 2018 ? Certains autres vont plus loin et demandent la tenue d’une
élection présidentielle anticipée, ce qui, aux dires des spécialistes, nécessite
une révision de la constitution du pays.
On se souvient quand même que
lors d’une conférence de presse conjointe tenue avec le président François
Hollande, lors de la visite officielle effectuée au Cameroun par le chef de l’État
français en 2015, répondant à un journaliste qui voulait savoir s’il allait se
présenter à l’élection présidentielle de 2018, Paul Biya avait répondu de
manière énigmatique, sans que cela ne surprenne personne, que cette échéance
était « lointaine mais certaine ».
Si pour certains,
l’organisation d’une présidentielle anticipée va forcément prendre de court les
adversaires politiques du président qui l’attendaient plutôt dans deux ans,
pour d’autres, la question se pose de savoir si Paul Biya a le choix. Peut-il
refuser d’accéder à ces appels répétés et insistants du peuple ? Rien
n’est moins sûr. Mieux, dans certaines localités, des militants des partis
d’opposition se sont joints à ceux du RDPC pour soutenir leur appel. Quelques
partis politiques ont déjà exprimé leur opposition à la candidature de Paul
Biya. Cela est compréhensible et normal dans un contexte pluraliste et
démocratique. Certains autres estiment qu’il est tout à fait normal que les
militants du RDPC appellent le président national de leur parti à briguer un nouveau
mandat à la tête de l’État; il revient à ceux qui veulent accéder à la plus
haute charge de l’État de s’organiser à leur tour pour aller vers le peuple
souverain et solliciter ses suffrages.
Au-delà de tous les débats
suscités par les appels à la candidature de l’actuel locataire du palais
d’Etoudi, la vérité est que Paul Biya a le droit que lui confère la
constitution de son pays de briguer un autre mandat à la tête de l’État. À
cela, ses partisans ajoutent le fait qu’il est la personne la mieux placée
aujourd’hui au Cameroun pour conduire la lutte contre le terrorisme et tordre
le cou à Boko Haram. Certains autres évoquent des raisons économiques. Le
président a en effet lancé depuis quelques années un certain nombre de grands
projets d’infrastructures dont l’ambition est de placer le Cameroun sur la voie
de l’émergence à l’horizon 2035.
Que toutes ces raisons soient
pertinentes ou non, le prochain chef d'État camerounais devra être élu par le
peuple souverain dans un scrutin libre, démocratique et
dont les résultats ne devraient souffrir aucune contestation. C’est là
l’essentiel. Toutes les parties prenantes, le peuple camerounais, les partis
politiques, les institutions qui organisent et gèrent les élections, etc., doivent
travailler dans ce sens.
Moane Ehindi
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